jeudi 27 septembre 2007

Le lieu où l'on fait souffrir


 (...)" L'enfer n'est pas le lieu de la douleur.
Il est le lieu qui fait souffrir.

Il n'est pas le Mal. le Mal a son lieu en nous. Nous ne pouvons servir de lieu à l'enfer.

Le Mal est sans lieu. Lorsque nous disons que son lieu est en nous, nous voulons dire que nous donnons à la douleur un lieu provisoire, car nous n'avons pas l'exclusivité de la souffrance; mais la souffrance, de son côté, n'existerait pas s'il n'y avait pas, pour l'éprouver, pour en témoigner, pour justifier en somme de sa réalité, l'homme qui souffre, l'homme aux prises avec sa propre douleur, dont les larmes et les cris ne sont que déchirantes manifestations de son mal.

Il n'a a pas de degrés dans le Mal.
Toute douleur est soi-même un tout. 
Le Mal est totalité de la souffrance.

Celui qui dit "J'ai mal" parce qu'il s'est blessé au doigt ou parce qu'on lui a arraché une dent, emploie le même mot que celui qui hurle sous la torture. 
Et pourtant qui oserait comparer leur souffrance?

Dans "enfermer", dans "enfermement" il a y  le mot "enfer". 
Et si l'enfer n'était que l'enfermement du mal dans le mal? 
Un mot - un monde - clos sur lui-même, comme le péché? "  (...) 

Edmond Jabès extraits de L'enfer de Dante / éd. Fata Morgana

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